Le Tam-tam virtuel des Elog Mpoo

Le Tam-tam virtuel des Elog Mpoo

Monographie du Canton Yakalag Mouanko

Cette monographie est en fait celle de l’arrondissement de Mouanko dans       lequel se trouve le Canton Yakalag Mouanko.

Elle est extraite du Mémoire de Maîtrise de Géographie de Mr Serge Auguste YEMY, soutenu       à l’Université de Yaoundé I sous la direction de Mr Dickens D. PRISO, chargé de cours.

 MOUANKO

 

Délimitation spatiale, une localité ouverte sur l’océan Atlantique

Mouanko, l’un des arrondissements du département de la Sanaga Maritime, région du Littoral au Cameroun se situe entre 9°35 à 9°40 et 10° à 10°5 de longitude Est et 3°15 à 3°45 de latitude Nord. Couvrant une superficie de 1.538 km², il est limité au Nord par l’arrondissement de Dizangué, au Nord-Ouest par l‘arrondissement de Douala 6ème (Manoka), à l’Est et au Sud par celui d’Edéa, à l’Ouest et au Sud-ouest par l’océan Atlantique. C’est un territoire de plaine côtière qui se prolonge jusqu’à Edéa dont l’altitude moyenne est de 39 mètres.

Le réseau hydrographique très dense ici, est un facteur de division qui isole le centre  de Mouanko des autres terres et à l’intérieur même, les villages les uns des autres. Ainsi on ne peut se rendre, sauf sur la terre du delta, d’un village à un autre sans traverser une rivière ou un bras de rivière. L’Arrondissement se divise en quatre zones presque autonomes.  La zone de la rive gauche jusqu’à Pongo-Songo  comprenant les villages Olombé, Mikaa, Dibongo et Bossambo Farm, séparée naturellement du reste  de l ‘arrondissement par la Sanaga et le Lac Tissongo à laquelle on intègre aussi le secteur Elog-Ngango qui va de Nsèppè jusqu’à Mbana, polarisé par la mission catholique de Marienberg (église, école, centre de santé, marché).

La zone de Mouanko proprement dite, qui étend son influence sur les villages du delta, ceux de la Kwakwa et ceux enclavés de la rive gauche (Yavii, Yatou et Yankonzok).

Le canton Malimba dans son ensemble.

La côte, de Badanguè à Moukoukè peuplée en majorité des pêcheurs étrangers qui ont transporté ici les modèles de leur organisation sociale. Il s’agit des villages Yoyo I, Yoyo II, Youmè I, Youmè II, Moukoukè et Suelaba sur la partie Nord de l’embouchure. Mbiako et Mouhendjè situés sur les deux embouchures de le Sanaga. Jongo à l’embouchure de la Loté et la zone de Badanguè jusqu’à la limite avec l’arrondissement d’Edéa au lieu dit Eyangésolè.

Il s’agit ainsi des sous-secteurs homogènes ayant chacun ses problèmes particuliers et qui, par la force de la nature, vivent assez repliés sur eux-mêmes, créant souvent chez certains leaders une mentalité de microrégion néfaste à la constitution d’un consensus autour de certains projets communs de développement : routes, écoles,  dispensaires…

 

         PRESENTATION PHYSIQUE DE MOUANKO

 

·         Des sols pauvres du fait d’un lessivage permanent

Les sols de Mouanko sont de texture sablonneuse, poreux et ne tiennent pas l’eau et les éléments nutritifs. Ils sont de couleur brune jaunâtre ou blanchâtre formés de sable fin, parfois recouverts de vase aux abords des cours d’eaux. Ces sols se subdivisent en quatre grands groupes : les sols ferralitiques, les sols d’apport marin, les sols d’apport fluvial, les sols hydromorphes.

De l’avis des spécialistes, ces sols de la basse plaine maritime à tendance hydromorphe, offriraient peu d’intérêt pour les activités agricoles. Il en serait de même pour les sols du bassin sédimentaire qui, en raison de leur potentiel organique et minéral déficient, ne conviendraient qu’aux cultures arbustives peu exigeantes (palmier à huile, hévéa) ou aux cultures extensives. Ce sont des sols pauvres, lessivés par les eaux et dépourvus de tout élément fertile.

 

·         Hydrographie : une région fortement irriguée 

La Sanaga commande tout le système hydrographique du secteur. En effet, le puissant fleuve  réglemente la vie des hommes et leurs activités. La Sanaga traverse Mouanko sur une distance d’environ 70 km. Elle devient, en raison du relief peu accidenté, un fleuve calme, qui coule lentement dans un extrême démembrement, laissant apparaître des îles et des îlots alimentant des criques et entraînant le trop-plein d’innombrables lacs. C’est au début de son immense delta que se trouve le chef lieu de l’arrondissement de Mouanko. Ici, la Sanaga dont la largeur atteint facilement deux kilomètres se divise en deux bras principaux. Celui de gauche, le plus important, atteint l’océan Atlantique 20 kilomètres plus loin après avoir formé la grande île de Malimba. Le bras droit qui porte le nom de Kwakwa va de son côté par un cours tortueux et tourmenté rejoindre à la baie de Manoka, ce qu’on appelait autrefois la rivière "Cameroun" - large estuaire formé par la Dibamba, le Wouri, le Moungo et l’Abo. Pendant la saison sèche (de novembre à mai), la Sanaga dont le volume des eaux diminue considérablement, a son lit encombré d’immenses bancs de sable.

Par contre, de juin à octobre, le fleuve sort de son lit et couvre d’importantes superficies sur les quelles se déposent des alluvions fertilisantes permettant de pratiquer les cultures de décrues. Ce caractère turbulent, capricieux même de ce grand fleuve qui, il faut le souligner encore, agrandit chaque année ses berges changeant ainsi sensiblement sont lit, gêne beaucoup la navigation.

Parmi les principaux lacs, il convient de signaler les lacs Tissongo, Mboli et Nsah. Mais aussi d’importantes zones marécageuses situées de part et d’autre de la Sanaga. Certains de ces marécages permettent, par différentes criques, la liaison des eaux de la Sanaga à celles du Nyong en saison de pluies, facilitant ainsi la communication par pirogues entre ces deux fleuves. Ces lacs et ces marécages forment une nappe d’eau continentale riche en poissons d’eau douce.

L’océan Atlantique qui borde le territoire à l’Ouest et au Sud-Ouest et dont le système de flux et reflux se fait sentir sur la Sanaga jusqu’au-delà de Mouanko est bordé de multiples campements éphémères qui grouillent de monde d’octobre à mars (période correspondant à la grande saison de pêche maritime). Cet impérialisme des eaux a fait appeler les autochtones de Mouanko les "gens de l’eau". Ces cours d’eaux ont donné lieu à une circulation plus ou moins importante, surtout pendant la colonisation allemande. Actuellement l’amélioration des équipements terrestres a considérablement ralenti leur utilisation. 

 

·         Un climat chaud et pluvieux rythmant les activités des populations

Le climat de Mouanko est de type équatorial camerounien. Il s’agit d’un régime de Mousson grâce à la déviation du courant d’alizé de Saint Hélène au franchissement de l’équateur. C’est un climat largement influencé par la proximité de l’océan Atlantique qui adoucit les températures et amplifie les précipitations.

Il est caractérisé par une chaleur moite et continue tout au long de l’année. Les températures sont élevées et varient annuellement entre 27 et 32° et l’amplitude thermique ne dépasse guère 5°c. Le mois de Mai avec des températures oscillant autour de 32° est le plus chaud, tandis que Août est considéré avec des températures autour de 27° comme le mois le moins chaud.

            Sur le plan pluviométrique, les précipitations sont abondantes et régulières au cours de l’année et variant entre 3000 et 4000 mm d’eau répartis entre plus de 200 événements pluvieux. Le minimum est de 2837 mm/an (1996) et le maximum de 4249 mm/an enregistré en 1998.

 

 

Histogramme de la pluviométrie de Mouanko   Source : CWCS Mouanko

 

Cet histogramme présentant la pluviométrie de l’année 2002 permet de constater que le mois le plus pluvieux est Août alors que le moins pluvieux est décembre. Cette pluviométrie élevée et régulière masque la petite saison sèche de juin-juillet. Ceci entraîne un prolongement de la petite saison des pluies qui débute en Mars-Avril et la division de l’année en deux grandes saisons d’inégales durées : une longue saison des pluies allant de Mars-Avril à Novembre (9 mois) et une courte saison sèche allant de Décembre à Février-Mars. Cette inégale répartition des saisons est due à la proximité de l’océan Atlantique et au déplacement du Front Intertropical. Ce découpage climatique conditionne aussi certaines activités sur le terrain. Ainsi, les populations se concentrent à la pêche, à l’agriculture et à la construction des maisons pendant la saison sèche alors que durant la saison des pluies, c’est la chasse qui est l’activité la plus pratiquée.

La saison sèche correspond à la grande saison de pêche maritime, à la période des semences ; on assiste donc ici au défrichement de vastes espaces ainsi qu’aux feux de brousse qui s’en suivent. C’est également la saison de la pêche des "Bissonda" dans la Sanaga. Cette saison facilite également la circulation fluviale et la baisse des eaux laisse apparaître d’immenses bancs de sable le long du lit de la Sanaga. Elle est aussi la période des baignades dans les fleuves et surtout des rencontres sportives comme la course des pirogues.

 Durant la saison de pluies, c’est la pêche continentale qui, du fait de la montée des eaux est pratiquée dans la Sanaga, la Kwakwa et les lacs. Cette montée des eaux fait aussi apparaître de nombreuses criques et ruisseaux (où se baignent les populations) dans le secteur. L’activité de l’Homme diminue sur la Sanaga; le balai incessant des pirogues navigant pendant la saison sèche ne se résume en ce moment qu’à quelques navettes pour des besoins vitaux. Les hommes pratiquent également la chasse pendant cette saison.

            Le climat, les sols et l’hydrologie associés à l’action anthropique déterminent la biodiversité que nous rencontrons dans l’arrondissement.

 

·         Une flore plus ou moins variée

            La conjonction des facteurs météorologiques et du système hydrographique offre à Mouanko une richesse floristique variée. Le paysage de Mouanko est en général celui de la forêt littorale. Elle renferme la plupart des essences tropicales commerciales parmi lesquelles le Moabi "Baillonella toxisperma", le Bubinga "Guibourtia tesmanii", l’Iroko "Milicia excelsa", le Bidou "Sacoglottis gabonensis"  et l’Azobé "Lophira alata", ce dernier servant à la construction des ponts en bois que l’on trouve sur l’axe Mouanko-Mbongo. Cette forêt littorale occupe la moitié du territoire de Mouanko et se localise au Sud de l’arrondissement et plus précisément au Sud du lac Tissongo, au Sud-Est de Bongo et au Nord de Eyangésolè. On  la retrouve aussi au Nord entre le canton Ndonga et Mouanko.

La zone basse du littoral ainsi que les criques sont dominées par la mangrove. Dans les zones marécageuses, se rencontre le palmier raphia (arbre à multiples usages) qui fournit les nervures pour la confection des toits et des murs de la majorité des cases de la région. Les lianes qu’on y trouve servent à la vannerie.

Le "Sissongo" ("Pennisetum purpureum"), sorte de grand roseau encore appelé "herbe à éléphant" et diverses autres liliacées qui poussent en bordure des fleuves et des rivières sont également utilisés pour la vannerie et la confection des chapeaux de paille et des tapis.

Mais d’après la Cameroon Wildlife Conservation Society (CWCS), l’on dénombre six types de formations végétales :

-  La forêt atlantique littorale à "saccoglottis gabonensis" d’une part et à "Lophira alata"  d’autre part.

-  La forêt marécageuse périodiquement submergée des basses vallées de la Sanaga avec "Upaca spp" ("U.guineesis", "U.slaudtii", "U.heudelotii"). 

-  La forêt marécageuse périodiquement inondée d’arrière mangrove, avec "Guibourtia demeusei" et "Oxystigma mannii".

- La forêt sur cordons littoraux sablonneux, avec "Saccoglottis gabonensis" et "Klainedoxa microphylla" sur sable, "Anthostema aubryanum" et "Ctenolophon engleranus" sur vase.

- Les mangroves hautes externes à grands "Rhizophora racemosa" et "Pandanus candelabrum".

-  La forêt secondaire située près des villages qui se sont concentrés en bordure des rivières et des lacs, est constituée d’une mosaïque de cultures et de forêts secondaires d’âges variables.

Dans les clairières, fruit du travail des hommes, notamment dans la pointe Nord du delta, le palmier à huile est très présent et domine le paysage le long  de l’axe Dizangué-Mouanko.

 

·         Une faune diversifiée

La faune terrestre de la région de Mouanko va des troupeaux de buffles, d’antilopes de toutes sortes aux pangolins, porcs-épics, fouines, panthères, aulacodes, phacochères en passant par les bandes de singes qui sont un véritable fléau pour les cultures. Les éléphants ne sont pas non plus rares dans le secteur et c’est pour cela qu’une grande partie du territoire de Mouanko est comprise dans la réserve de Douala/Edéa.

Les reptiles et ophidiens quant à eux vivent dans les broussailles, les eaux fluviales et continentales : varans, pythons, vipères, couleuvres, crocodiliens, tortues, marsouins et lamantins sont nombreux dans la région.

L’avifaune est représentée par une grande variété d’espèces comprenant des canards sauvages, des grues puchées, des toucans, des charognards, des éperviers, des perroquets, des perdrix, etc.

Mais l’on s’intéresse avant tout à la faune aquatique, l’abondance des lacs, des marécages et des rivières en offre une grande variété. On y trouve des silures, des capitaines, des carpes, des machoirons. Le "Sambo", petit poisson qui se rencontre en amont du fleuve Sanaga, à Elog-Ngango, est une espèce très appréciée dans tout le Sud Cameroun. Les crevettes de la région alimentent les marchés avoisinants de Dizangué et d’Edéa. Le fond de la Sanaga, surtout aux abords des bancs de sable est très riche en palourdes ou "Bissonda".

La faune maritime quant à elle n’intéresse les populations de Mouanko que pour la pêche des "Bipaka"; d’autres espèces sont également prisées. La vocation de la région pour la pêche n’est plus à démontrer.

En somme, les ressources naturelles du sol et des eaux font de Mouanko, en raison de leur complémentarité, un des secteurs importants du département de la Sanaga-Maritime.

 

PRESENTATION HUMAINE DE MOUANKO

Si l’on tient compte des données de l’histoire orale, on peut affirmer que la population de Mouanko est très ancienne. Cependant, l’exubérance de la végétation et le fait que l’activité principale des populations de la région fût pendant de nombreuses générations la pêche, font que l’emprise de l’homme sur la nature reste insignifiante jusqu’à nos jours. Les populations de la Basse-Sanaga se rencontrent presque exclusivement le long des rives de la Sanaga, de la Kwakwa et de l’océan Atlantique. Il existe également quelques villages à l’intérieur des terres notamment autour du lac Tissongo.    

La diversité ethnique mérite donc d’être connue par quiconque veut mener une action de développement dans le secteur, juste pour éviter quelques susceptibilités et maladresses, Mais beaucoup d’éléments militent plutôt en faveur de la cohésion.

 

Le peuplement

·         Le peuplement d’origine

            Les Malimba

Les Malimba sont incontestablement les premiers à s’installer dans le secteur. Après la séparation avec les Duala à cause d’une histoire d’inceste, ils n’avaient pas tous pris la même direction. Toutes les traditions Malimba s’accordent sur ce sujet. Ils sont des descendants de ILIMBE ou encore ILIMB’A MBEDI. D’aucuns les apparentent aux Duala dont ils sont effectivement les cousins germains et très proches par la langue.

Les Malimba forment de par leur origine trois groupes : les Bongo, les Mal-Mbenguè et les Mal-Jedu. C’est à la suite des guerres tribales que Mal-Mbenguè et Mal-Jedu ont été repoussés jusqu’à l’aval de la Sanaga par les Yakalak sur l’île de l’embouchure du bras principal de la Sanaga, à laquelle ils ont donné leur nom.

Les Yakalak ou Yakalag

Ils appartiennent au groupe ethnique dit "Elog-Mpoo", on les connaît plus sous l’appellation de "Bakoko", nom que leur auraient donné les Malimba. Ils sont venus de l’intérieur, sortis de ce fameux rocher historique "Ngog lipondo"encore appelé "Ngog lituba". Ils arrivent par la Kwakwa (comme leurs voisins Malimba) lors de la grande migration des Elog-Mpoo. Ils abordent à Bémenguè et s’étendent jusqu’à Epollo où ils rencontrent la Sanaga et les premiers occupants qui s’y trouvent (les Malimba). Ils les repoussent jusqu’à l’aval de la Sanaga, lieu qu’ils occupent de nos jours et qui s’étend désormais sur les rives gauche et droite de la Sanaga, de Elog-Ngango à Epollo en passant par Olombè, Yankonzok et Yatou. Une partie des Dibongo et Olombè est arrivée de Yassoukou par la rivière Dipombé. Leur arrivée dans le secteur remonterait à quatorze générations depuis leur ancêtre KALKE MPAM A MPOO dont ils portent le nom.

Les Yakalak sont composés de trois grands groupes ; les plus importants de ces groupes et qui se disent descendre directement de KALKE sont les Elog-Otot, les Ndog-Tounda et les autres enfants de KALKE.

Comme les Malimba, les Yakalak souffrent de l’émigration de leurs ressortissants. C’est ainsi que depuis longtemps d’ailleurs, beaucoup de  familles, ont quitté ce secteur pour s’installer à Songueland dans l’arrondissement de Dizangué et à Ekité, sur la rive de la Sanaga opposée à la ville d’Edéa.

Pêcheurs et pagayeurs de métier, les Yakalak sont cependant plus agriculteurs que leurs voisins Malimba.

Les Pongo-Songo

            Arrivés après les Yakalak et les Malimba, les Pongo-Songo descendent eux aussi d’une tribu Banjué (comme les Malimba) ; issus de ESSONGO, fils de MBEDI (sont cousins des Duala et Malimba). Ils seraient venus par la mer et auraient d’abord, pendant longtemps, vécu mélangés aux Batanga de petit-Batanga sur la rive gauche de l’embouchure du Nyong à la Sanaga. Pratiquant la pêche maritime et surtout fluviale, les Pongo-Songo découvrirent par les criques et les marécages qui relient le Nyong à la Sanaga, le grand lac Tissongo. De là, continuant leur exploration, ils aboutirent sur la Sanaga et s’installèrent sur la rive gauche de ce grand fleuve entre Olombè et Yankonzok plus précisément dans les villages de Pongo-Songo I et II. En face de ce qui est devenu par la suite la mission catholique de Marienberg.

Bien qu‘administrativement rattachés au canton Yakalak avec lequel ils entretiennent de bonnes relations traditionnelles, les Pongo-Songo sont cependant, par la langue et l’organisation sociale traditionnelle, plus proches des Malimba. Comme chez ces derniers, leur territoire est constamment inondé ; aussi, les Pongo-Songo élèvent-ils des digues. C’est alors que dans le souci de trouver des terres fermes, ils émigrent. C’est ainsi qu’ils ont créé le grand village de Pongo-Pitti à Dizangué (sur l’axe Edéa-Dizangué). Comme leurs voisins Malimba et Yakalak, ce sont des pêcheurs et pagayeurs de métier, mais qui s’adonnent en outre à l’agriculture (bananier, taro, igname) du fait de la fertilisation annuelle de leurs berges par les inondations de la Sanaga.

Malgré le brassage que l’on perçoit facilement, les trois peuples conservent une conscience très nette de leur originalité et de leur particularité. On le constate notamment dans les langues de cultes et la constitution des équipes de pêche. Il était très rare de rencontrer des  équipes de pêche mixtes Yakalak-Malimba, Malimba-Pongo ou Pongo-Yakalak. Le temps ayant atténué voire effacé les anciennes palabres et guerres tribales, de nombreux mariages se nouent indifféremment entre les jeunes garçons et les jeunes filles de ces trois groupes ethniques. Chacun des peuples conserve jalousement et perpétuellement dans la mémoire des jeunes générations le souvenir de son passé. Cette  "pseudo animosité", qui régnait jadis, ne s’exprime en fait de nos jours que dans quelques chansons populaires et dans les lazzis. On assiste ainsi à la naissance d’une société de parenté à plaisanterie comme il en existe dans d’autres régions d’Afrique.

·         Les étrangers et allogènes

Les Nigérians dont l’arrivée remonte à 1950. Dès 1970, on évalue leur nombre à 1000 environ. De nos jours, on estime que leur nombre aurait doublé voire même triplé.

Comme tous les côtiers, les nigérians de la région de  Calabar (Ijaw) avaient

Les allogènes constitués de fonctionnaires camerounais travaillant à Mouanko, mais aussi de quelques Bassa, Ewondo et Yambassa qui, pour des raisons historiques (notamment du temps du commerce des esclaves) se sont définitivement installés à Mouanko. On les retrouve surtout dans la région du lac. On y trouve en outre des populations originaires des provinces du Nord-Ouest et Sud-Ouest travaillant surtout dans les palmeraies de la région ainsi que celles originaires de la partie septentrionale du Cameroun.

 

 

Evolution historique de Mouanko

Mouanko a été doté d’une unité administrative autonome ou plutôt semi autonome en 1950. Il devient le district de Mouanko le 08 août 1959, puis érigé en arrondissement le 14 novembre 1979. C’est ainsi que de nombreuses structures accompagnant ce nouveau statut ont été et continuent d’être créées dans la ville. Il s’agit notamment sur le plan administratif, de la Sous-préfecture, du Collège d’Enseignement Secondaire (devenu plus tard Lycée), du Poste de la Douane, du Poste de la Forêt et de la Faune, de la Conservation de la Réserve de Douala-Edéa, de la Délégation de l’Agriculture et du Développement rural, de la Délégation de l’Elevage et des Pêches, de l’Inspection de l’Education de Base, de la Perception du Trésor, du Centre Médical d’Arrondissement, du Centre de Santé Intégré de Malimba, des Centres de Santé de Lobéthal, de Yoyo, Youmè II et Marienberg, de la SAR/SM, du Bureau de Poste et Télécommunications, du Centre d’Education et d’Action Communautaire, de la création des Cantons autonomes Malimba et Yakalak de Mouanko.

Sur le plan infrastructurel, nous pouvons citer entre autres la construction de la route Mouanko-Océan (Mouanko-Yoyo-Suelaba), des adductions d’eau potable (châteaux d’eau, bornes fontaines et forages), des antennes de téléphonie mobile MTN et ORANGE, de la construction du grand marché de poissons de Yoyo I, de l’installation de l’Organisation Non Gouvernementale Cameroon Wildlife Conservation Society (CWCS), des centres zootechniques.

Il est vrai, Mouanko a un genre de vie pas assez différent de celui du monde rural, mais renferme un potentiel d’aptitudes urbaines de par ses services ; il est donc préférable à l’heure actuelle de le considérer comme "centre semi-urbain.

 

LES ACTIVITES DE LA POPULATION

 

Lorsqu’on parle de Mouanko, on pense d’abord à la pêche

La majorité de la population active pratique la pêche avec plus ou moins d’intensité ; dès le bas âge, d’ailleurs, les enfants pratiquent la pêche, d’abord à la ligne, puis à l’épervier dans la Sanaga et la Kwakwa. Elle est une activité quotidienne à laquelle certains hommes s’adonnent dans la matinée, dans la soirée ou encore pendant la nuit.

 On peut dire de façon générale qu’il existe deux types de pêches : une pêche artisanale continentale qui se pratique dans la Sanaga, la Kwakwa et dans les lacs (Tissongo, Mboli, Nsah) ainsi qu’une pêche artisanale maritime se pratiquant dans l’océan Atlantique.

La grande pêche "Ndio" a surtout lieu pendant la saison sèche (novembre-mai). En effet la remontée des eaux salées favorise la présence de diverses variétés de poissons qui attirent de  nombreux pêcheurs. Ces derniers partent ainsi pour plusieurs mois et vivent dans les campements de pêcheurs "Kom".

Ce calendrier de pêche dépend aussi du genre de pêche pratiquée et des espèces de poissons que l’on veut prendre. Les pêcheurs connaissent en effet assez parfaitement le mouvement des bancs de poissons ainsi que leur période de maturité. Ils connaissent aussi les endroits précis sur le fleuve où se rencontrent les différentes espèces de poissons. Par exemple, tandis que les pêcheurs de Marienberg à la mer pêchent le "Mbogi" en février-mars, le secteur en amont, surtout à Dibongo, est plutôt spécialisé dans la pêche d’un petit poisson appelé "Sambo" et des "Bangangé" d’octobre à décembre.

 

La pêche des palourdes, une activité florissante

Cette pêche a connu un véritable boom au début des années 1990, les "Bissonda" sont désormais sollicités à la fois pour leur chair que pour leur coquillage. C’est une pêche saisonnière qui se pratique pendant la saison sèche et au début de la saison des pluies (de janvier à août) et de lundi à jeudi (le week-end étant réservé à la commercialisation de la production hebdomadaire).

Chez les Yakalak, elle se pratique par les adultes et les jeunes hommes, tandis que tout le monde la pratique chez les Malimba (hommes, femmes et jeunes gens) du fait de la proximité du lieu de pêche de leur village, ils n’ont pratiquement pas d’effort à fournir.

La pêche dans les "eaux  noires" des lacs et marécages

Les "eaux noires", selon le terme utilisé par les populations autochtones, sont les eaux des lacs, des marécages et des petites rivières (le fond de ces cours d’eaux est recouvert d’algues et de feuilles mortes d’arbres qui les entourent) qui débouchent sur la sanaga. Ces eaux sont très poissonneuses et renferment des espèces qui sont très prisées par les populations : brochets, carpes, silures, poissons électriques, crevettes et anguilles.

C’est aussi dans ces eaux noires en général que se rencontrent les crocodiles et les caïmans ainsi que les tortues aquatiques. La pêche dans le lac Tissongo est parfois l’unique occupation d’une certaine catégorie de personnes où, comme au bord de la mer, s’installent de véritables campements de pêche. Il en est de même, mais à une moindre importance du lac Mboli limitrophe de l’arrondissement de Dizanguè et qui continue de ravitailler en poisson jusqu’à ce jour, les employés de la SAFACAM de Dizanguè et le canton Ndonga.

Les espèces pêchées ici sont surtout les "Milé" (Synodontis obesus boulenger"), les "Sumé" ("Arius")…  

 

L’agriculture et la chasse, deux activités de soudure

 

L’agriculture : Après la pêche, l’agriculture est la seconde activité traditionnelle des natifs de Mouanko qui l’alternent avec la pêche. Elle est surtout sur brûlis et se fait selon un calendrier traditionnel que les populations maîtrisent bien et qui dépend des facteurs climatiques.

Les principales productions concernent surtout le manioc, le taro, le maïs, la patate, la banane, le pistache.

La chasse : Cette activité traditionnelle est intensément pratiquée pendant la saison des pluies, lorsque, du fait de la montée des eaux, les populations abandonnent provisoirement la pêche maritime. Les techniques de chasse sont surtout traditionnelles et dépendent des saisons. On note ainsi la chasse au piège à câble, la chasse à courre et le fusil. La méthode la plus utilisée pendant la saison des pluies est le piège à câble. Mais, pendant la saison sèche, on note une baisse des pièges et une forte utilisation de la chasse à courre avec les chiens. Le fusil quand à lui n’a pas de saison et est utilisé aussi bien en saison sèche qu’en saison des pluies. Les espèces les plus capturées sont entre autres les singes, varans, phacochères, hérissons, porcs-épics, rats, crocodiles, lièvres, sangliers etc.

 

Le primaire, un secteur en constante diversification

Les populations locales étaient pendant longtemps spécialisées dans la production des cultures vivrières destinée surtout à l’autoconsommation (manioc, taro, plantain, macabo, maïs, pistache et arachides). L’on peut également joindre à cette gamme le palmier à huile qui est cultivé dans la région depuis un peu plus de 30 ans et dont la quasi totalité de la production était  surtout destinée aux industries agroalimentaires de la SOCAPALM de Mbambou et Mbongo et de la SAFACAM de Dizangué.

            Depuis une dizaine d’années environ, l’on s’aperçoit que la tendance est plutôt à la diversification de l’agriculture. Elle ne cesse de prendre de l’ampleur avec la baisse de la production halieutique, de l’exode urbain et du dynamisme de certaines élites de la région. L’impulsion des Groupes d’Initiatives Communes et de quelques autochtones y a été déterminante.

La diversification du secteur primaire n’a pas seulement touché la production agricole, mais aussi l’élevage.

            L’on peut de nos jours affirmer, que c’est l’élevage qui incontestablement a le plus été transformé. 

 

Les activités de transformation du secteur secondaire

Pendant longtemps le secteur secondaire à Mouanko ne se réduisait qu’à l’artisanat et quelques métiers représentés par les menuisiers, les tailleurs, les maçons, les électriciens, les coiffeurs, les scieurs… Mais compte tenu de la création de nouveaux services et de la présence de nombreux allogènes venus chercher fortune dans la ville. Une multiplication des activités s’observe depuis quelques années.  C’est dans ce sens que l’on a vu s’installer de nouveaux métiers de plombier, frigoriste, sérigraphe, photographe, mécaniciens…

L’abondance du palmier à huile dans le secteur a également donné naissance à une usine moderne de transformation de l’huile de palme appartenant à la SOPIMO et qui emploie 40 personnes. Une quinzaine d’huileries traditionnelles) toutes situées à l’entrée de la ville à proximité des grandes palmeraies. Ces huileries emploient environ 80 personnes et leur production est destinée aux marchés des grandes villes voisines. Elles existent depuis une dizaine d’années environ et fonctionnent dans l’illégalité. 

            La ville de Mouanko a un garage dans lequel exercent trois mécaniciens qui s’occupent à la fois des voitures et des motos.       Les deux tailleurs de la ville font la couture pour homme et femme.  L’artisanat traditionnel ici est la spécialité des vieux qui à l’aide des matériaux tels que le rotin, le bambou, la liane et le bois fournissent des paniers, lits, guéridons, fauteuils, tables, pagaies que l’on trouve en vente sur les marchés locaux. Pour enrichir cette liste de petits métiers du secondaire, mentionnons la présence de trois salons de coiffures (deux spécialisés dans la coiffure pour dames et l’autre pour homme), cinq électriciens qui sont le personnel de AES-SONEL (mais qui, lorsque le besoin se fait sentir, dépannent les installations des particuliers), un photographe, un plombier, un frigoriste et un sérigraphe.

Toutes ces activités transforment lentement le centre urbain de Mouanko, la grande industrie quant à elle est inexistante.

 

Le secteur tertiaire et l’introduction de nouvelles activités

            Le commerce occupe désormais une place importante dans la ville de Mouanko, comme l’agriculture il est un autre palliatif à la pêche artisanale maritime.

Le secteur urbain de Mouanko compte dix bars pour la vente de boissons alcoolisés, une alimentation générale (dans laquelle on trouve un peu de tout), huit restaurants et douze boutiques. Les tarifs sont généralement plus élevés que ceux que l’on rencontre par exemple dans les villes d’Edéa et de Douala. Ils sont d’ailleurs très fluctuants entre la saison sèche et la saison pluvieuse.

Le plus important dans ce secteur tertiaire est l’introduction à Mouanko d’un type d’activités, issues d’une tendance générale au Cameroun dans le secteur des transports et de la téléphonie mobile. Il s’agit des phénomènes de "mototaxis" et de "call boxes" (points téléphoniques mobiles). L’on compte à ce jour dans la ville de Mouanko une trentaine de "mototaxis"           qui sillonnent et facilitent de ce fait les déplacements des populations urbaines et rurales. Comme autre commerce récemment popularisé dans la ville, l’on note l’essor de la vente du sable que l’on extrait de la Sanaga. Le secteur de l’hébergement n’est plus à la traîne, dans la zone urbaine, l’on compte désormais quatre auberges pour une capacité globale d’environ 40 lits.

Le commerce des vivres quant à lui n’est important que les jours de marché. Ainsi les mardis et mercredis, le marché d’Epollo se transforme en lieu de brassage des populations rurales et urbaines de l’arrondissement de Mouanko et des villes voisines. Une étude d’huissier de justice a été crée, et depuis une quinzaine d’années la Cameroon Wildlife Conservation Society, ONG spécialisée dans la protection et la conservation de la flore et de la faune, y est installée.

 

Le système éducatif

L’arrondissement de Mouanko compte 21 établissements dont 03 maternelles, 16 primaires et 02 secondaires. 04 de ces écoles primaires (Mbiako, Yoyo I, Yoyo II et Bolondo) et 01 maternelle (Yoyo II) sont des écoles à système éducatif bilingue, ce qui vise à permettre l’intégration des nombreux jeunes Nigérians présents dans les campements de pêche.

            Un centre d’accueil des jeunes de Mouanko est en construction depuis mai 2008 financé par le Fonds Bernard EDING (FBE), et a pour principal objectif de créer un cadre propice et adapté à l’épanouissement et à l’éducation des jeunes de cet arrondissement.

 

 Rapports entre Mouanko et les villes voisines

Mouanko est un arrondissement du département de la Sanaga-maritime, dont dépendant d’Edéa. Edéa et Mouanko sont distants de 59 kilomètres. Ce trajet se parcourt sans problème en saison sèche, ce n’est qu’en saison pluvieuse que certains endroits deviennent impraticables.  Le tarif officiel du transport entre ces deux villes s’élève à 1500 francs cfa et le trajet dure en moyenne une heure trente minutes. 

Entre Edéa et Mouanko,  Dizangué est une ville relais distante de la première de 18 kilomètres, et de la seconde de 41 kilomètres.

            La véritable plaque tournante de Mouanko est, et le restera encore pendant de nombreuses années douala, chef lieu de la province du littoral et capitale économique du Cameroun. Douala est séparé de Mouanko par une distance de 90 kilomètres, par une route en terre longue de 60 kilomètres qui traverse la Socapalm de Mbongo et rejoint à 30 kilomètres de douala, l’axe lourd Douala-Yaoundé.

une agence de voyage "Mouanko-express" basée au camp Yabassi à douala, a ouvert ses portes il y a environ neuf ans et assure le transport des biens et personnes vers Mouanko. deux voitures partent désormais le matin, 8 heures et 11 heures et rentrent toutes les deux sur douala l’après midi. la troisième et dernière baptisée "la couchette", part de douala en soirée vers 18 heures. Elle quitte Mouanko très tôt le lendemain à 6 heures pour rentrer sur Douala.



29/10/2009
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